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Externalisation des dépenses de prestation

Suite décision Conseil d'Etat n° 428127 sur la soustraitance et le CIR. Gardons raison.

Le Conseil d’Etat, lecture du 22 juillet 2020, ECLI:FR:CECHR:2020:428127.20200722 ; Décision n° 428127, donne raison à la Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences (FNAMS) pour la prise en compte des dépenses de prestations externalisées associées à un projet qualifié d’éligible au CIR.

 

Il résulte de l’instruction que la FNAMS a confié à divers prestataires des études analytiques et des tests permettant, notamment, d’étudier l’impact de nouvelles solutions de lutte contre les bio-agresseurs ou la dynamique d’absorption de l’azote pour une espèce donnée, faute de disposer elle-même des équipements scientifiques nécessaires, tels que des chambres de culture, des laboratoires de pathologie sécurisés, ou des outils de détection lui permettant d’effectuer elle-même ces opérations. Il n’est pas contesté que les prestations en cause, qui s’inscrivaient dans le cadre scientifique des projets de recherche entrepris, étaient nécessaires à la réalisation des opérations de recherche menées par la FNAMS.

 

C’est une excellente nouvelle.

Cependant, gardons raison :

  • Les activités sont « des études analytiques et des tests ». Une prestation de mesure sera-t-elle traitée de la même manière ? et plus largement les activités de routine nécessaires et indispensables à la levée d’incertitude sur le projet du donneur d’ordre, seront-elles traitées de la même manière ?

 

ET

  • Le donneur d’ordre « ne dispose pas des équipements scientifiques nécessaires ». Est-ce qu’une activité d’analyse nécessaire mais complémentaire (par exemple pour accélérer les délais d’analyses) à celles de l’entreprise, sera-t-elle retenu comme éligible ?

 

 

Ainsi seraient éligibles les activités « nécessaires et indispensables ».

  • Nécessaires au sens de la compétence, des moyens…
  • Indispensables, sans quoi le projet ne pourrait pas aboutir, au sens où l’entreprise n’est pas en mesure de faire autrement que de solliciter un prestataire.

Au-delà de cet arrêt, constituant une belle avancée, une simplification des calculs pour le CIR par les donneurs d’ordre, une simplification des contrôles par la limitation de débats sur l’activité soustraitée…nous sommes encore un peu loin des textes de références sur le CIR, soit le Code Général des Impôts, le Bulletin Officiel des Impôts et le Manuel de Frascati. En effet,

 

  • Selon le BOI-BIC-RICI-10-10-10-20-20161102, l’alinéa 310 stipule que :

Si l’objectif du projet est de dissiper une incertitude scientifique et/ou technique et que la démarche ci-dessus, qui requiert l’établissement de l’état de l’art, a été respectée, le projet sera considéré comme un projet de R&D et, dans ce cas, les activités nécessaires à sa réalisation seront éligibles. Dans cette perspective, un projet particulier peut être considéré comme de la R&D s’il est entrepris avec un certain objectif, mais ne le sera pas s’il est entrepris dans un autre.

Par ailleurs, dès lors qu’un projet est qualifié de projet de R&D, l’ensemble des opérations nécessaires à sa réalisation est considéré comme de la R&D, y compris dans le cas où ces opérations, si elles étaient prises isolément, ne constitueraient pas de la R&D.

Selon Frascati, Edition 2015, l’alinéa 9.48, page 229, reprend le fameux exemple de la prise de sang :

D’après ces critères, toutefois, un projet particulier peut ou non être considéré comme de la R-D selon qu’il est entrepris dans un but ou un autre, comme l’illustre l’exemple suivant : dans le domaine de la médecine, réaliser une autopsie de routine pour déterminer les causes d’un décès est une pratique médicale courante, qui ne peut pas être rattachée à la R-D ; en revanche, une enquête de mortalité destinée à établir les effets secondaires d’un traitement contre le cancer relève de la R-D. De même, les tests de routine, comme les analyses de sang et les examens bactériologiques réalisés dans le cadre de bilans de santé ne relèvent pas de la R-D, contrairement aux programmes de tests sanguins visant spécifiquement les patients qui prennent un nouveau produit pharmaceutique.

 

Selon Frascati, Edition 2015, l’alinéa 4.60, page 133, stipule :

S’il s’agit de tâches (ne relevant pas nécessairement de la R-D) qui sont indispensables pour la R-D intra-muros de l’unité mais qui ont été sous-traitées, les coûts correspondants peuvent généralement être comptabilisés dans les dépenses de R-D intra-muros (autres dépenses courantes).

Enfin, notons néanmoins que les textes de références peuvent aussi aller dans un sens inverse de celui qui précède. En effet, nous avons encore :

Le Code Général des Impôts qui précise :

d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. Pour les organismes de recherche établis dans un Etat membre de l’Union européenne, ou dans un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, l’agrément peut être délivré par le ministre français chargé de la recherche ou, lorsqu’il existe un dispositif similaire dans le pays d’implantation de l’organisme auquel sont confiées les opérations de recherche, par l’entité compétente pour délivrer l’agrément équivalent à celui du crédit d’impôt recherche français.

BOI-BIC-RICI-10-10-20-30 du 05/04/2017 ; concernant les dépenses de recherche externalisées :

« Les dépenses engagées doivent correspondre à la réalisation de véritables opérations de recherche et de développement, nettement individualisées. »

Frascati, Edition 2015, alinéa 2.50 page 65, Tableau 2.3 :

Guide du ministère de la Recherche, Edition 2019 :

La sous-traitance éligible au CIR doit répondre à un besoin de compétences spécifiques pour réaliser une opération de R&D, dans le cas où le donneur d’ordre n’a pas les compétences adéquates pour réaliser l’opération. Le sous-traitant doit donc assumer la coordination scientifique de la prestation de recherche. On parle aussi de sous-traitance de complémentarité car le donneur d’ordre, qui n’a pas les compétences adéquates pour réaliser l’opération en interne, exige de son sous-traitant, des compétences techniques élevées.

Dans le cas contraire, où le sous-traitant est un simple exécutant d’une opération définie par le donneur d’ordre qui assure la coordination scientifique de la prestation de recherche, la sous-traitance n’est pas éligible au CIR. Il s’agit d’une sous-traitance de capacité.

IMPORTANT ! Les travaux sous-traités doivent correspondre à la réalisation de véritables opérations de R&D, nettement individualisées (une prestation sous-traitée qui n’est pas de la R&D n’est pas éligible au CIR même si elle est indispensable à la réalisation du projet).

En conclusion, l’arrêt du Conseil d’Etat est une excellente nouvelle mais se borne à un cas précis d’externalisation. Les autres cas pourraient ne pas être traités de la même manière à la lecture des éléments ci-dessus.

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