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Le CIR ne sera plus un moteur de la collaboration public-privé !

Le CIR ne sera plus un moteur de la collaboration public-privé ! Contexte, commentaires, impacts…

 

1. Le changement du CGI 244 quater B

L’article 35 de la LOI n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 (LOI n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 (1) – Légifrance (legifrance.gouv.fr) a introduit plusieurs modifications dont la suppression du doublement du montant des dépenses externalisées auprès des acteurs publics et la baisse du plafond des dépenses externalisées, dans l’assiette du CIR, à compter du 1er janvier 2022.

En annexe 3.4, vous trouverez les motifs du changement de loi ainsi que les évaluations préalables (base 2016). Ces textes donnent la genèse de la loi. Notamment :

  • Le premier motif : harmoniser la prise en compte des dépenses externalisées entre public et privé.
  • Les recommandations de la Cour de Comptes, dans son rapport 2013, de maitriser le montant du CIR.
  • Une plainte formelle auprès de la Commission Européenne pour aide d’état illicite (voir notre exposé sur l’assimilation d’organes publics à des entreprises, chapitre 3.2).
  • L’option 2, qui limitait le doublement à la recherche fondamentale, en accord avec le règlement européen, et hélas rejetée pour complexité d’appréciation du caractère fondamental de la recherche.
  • La sous-évaluation de l’impact financier, basé sur le CIR 2016 et n’intégrant pas la baisse du plafond.

Extraits de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 (hors le sujet Corse, lien ci-dessus) :

« Le d est abrogé » ; « Le d ter est ainsi modifié : le dernier alinéa est supprimé »

Avant modification nous avions :

d) Les dépenses … confiées à (acteurs publics ci-dessous) des acteurs publics …. Ces dépenses sont retenues pour le double de leur montant pour la seule part relative aux opérations réalisées par ces organismes …

d ter) dernier alinéa : La plafond de 10 millions d’euros … est majoré de 2 millions d’euros à raison des dépenses correspondant aux opérations confiées aux organismes publics (acteurs publics ci-dessous)

Commentaires KMCe4U

La sanctuarisation du CIR, pourtant confirmée régulièrement depuis au moins 2013, vient d’être écornée par des ajustements successifs :

  • réduction des frais de fonctionnement pour le personnel (passage de 50 à 43%).
  • prise en compte des dépenses confiées aux acteurs publics « pour la seule partie relative aux opérations réalisées… » dans une logique de contrôle des prestations en cascade.

et pour finir l’année 2020

  • fin du doublement des dépenses confiées à des acteurs publics, à compter du 1er janvier 2022.
  • réduction du plafond des dépenses externalisées, à compter du 1er janvier 2022.

Sommes-nous dans une coupe conjoncturelle du CIR sans concertation, ni stratégie ou vision ?

Cette loi de finances coupe les ailes aux collaborations public-privé, essentielles pour l’émergence de structures publiques autonomes, essentielles pour le transfert de technologie et l’innovation… mais garde par ailleurs des dépenses ne contribuant pas directement à l’innovation.

Les collaborations avec le public ne sont pas toujours faciles du fait de délais élevés (perception des entreprises), de complexités administratives, de partage de la propriété intellectuelle (PI)… et le gain de CIR associé était un moyen de contrebalancer. Avec cette loi, le CIR et le coût final seront égaux entre privé et public. Ainsi, les choix pourront se porter sur des acteurs privés plus souples sur l’administratif et régulièrement plus rapides dans leur réponse.

In fine, cela réduira les dépenses de recherches confiées à des acteurs publics par les entreprises, cassera la dynamique observée (Ministère de la recherche et de l’innovation, 2012) d’accroissement des dépenses vers le public (selon l’article : « Les variables retenues comme susceptibles d’avoir un impact sur le comportement des entreprises en matière de coopération sont la taille, l’activité principale classée par intensité technologique, la localisation du marché, la stratégie de l’entreprise et le fait d’avoir bénéficié de financements publics. ») et posera de nouveau le problème de la rétention des « cerveaux » en France.

Les changements dans le calcul du CIR ? Impacts pour les entreprises.

  • La fin du doublement des dépenses auprès des acteurs publics (voir liste ci-dessous, chapitre « Quels sont les acteurs publics impactés ? »). Selon notre connaissance, un impact variant entre 0% et plus de 5% du CIR (voire plus si transfert technologique vers une start-up).
  • Diminution du plafond des dépenses de prestations externalisées. Passage de 12M€ à 10M€ d’assiette de dépenses éligibles. Soit une réduction « immédiate » de 600k€ de CIR pour les entreprises concernées.
Commentaires KMCe4U

Mais qu’en sera-t-il des contrats de collaboration signés avant le 1er janvier 2022 ?? Aurons-nous un régime similaire à celui appliqué aux contrats de collaborations entre un donneur d’ordre et un fournisseur privé agréé ? Pour mémoire, dans ce cas, le fait générateur pour la prise en compte de la dépense dans l’assiette du CIR, considérant la période d’agrément du fournisseur, est la date de contrat et non pas la date de facturation. Dans ce cas l’effet de la présente loi serait vraisemblablement décalé de plusieurs mois. Cette approche serait à minima « juste » considérant que le contrat de collaboration a été passé en intégrant, au moment de la signature, ce doublement du montant des dépenses dans le CIR. A suivre…….

La réduction du plafond des dépenses impacte que peu d’entreprises parmi les plus grandes. Cependant, ces dernières sont, à n’en pas douter, celles qui travaillent le plus avec le public, et le plus souvent sur des sujets de recherches fondamentales.

Le non doublement des dépenses provoque quant à lui un effet très important pour toutes les entreprises déclarant du CIR. Avec des pertes en CIR qui peuvent être très significatives. Comme nous l’avons déjà entendu des arbitrages seront rendus dans le cadre de choix entre des acteurs privés et publics. Parions hélas que des arbitrages seront en défaveur des acteurs du public.

Pour exemple désastreux, une start-up, démarrant suite à un transfert de technologie, recours fortement à des prestations avec l’acteur public cédant la technologie. Cette start-up sera sans aucun doute en difficulté avec ce non doublement !

Quels sont les acteurs publics impactés ?

  • Tous les organismes publics français ou européens suivants : les organismes de recherches publics, les établissements d’enseignement supérieur délivrant un master, les fondations de coopération scientifique, les établissements publics de coopération scientifique, les fondations d’utilité publiques du secteur de la recherche, les associations fondées par un organisme de recherche ou un établissement d’enseignement supérieur, les instituts techniques du L830-1 du code rural et de la pêche, les communautés d’universités et établissements, les stations et fermes expérimentales dans l’agriculture.
Commentaires de KMCe4U.

Les organismes publics devraient perdre une partie de leurs ressources financières (devenant égaux des organismes privés en termes financiers mais pâtissant d’une image de lenteur, lourdeur et complexité sur la PI). Ils se verront aussi réduire la part de financement privé pour des recherches « amonts » ou « fondamentales ».

Les écoles et universités devraient voir réduire leurs opportunités de collaboration avec les entreprises. Il en va de même pour les stations expérimentales, les communautés…

Les fondations et associations pourraient être impactées. Néanmoins, les entreprises pourront utiliser le crédit d’impôt mécénat égal à 60% jusqu’à 2M€ de dons puis 40% au-delà des 2M€.

Les impacts seront donc variables selon les acteurs publics mais, d’évidence, certains de ces acteurs vont plus souffrir de la mesure que d’autres.

Il est à noter que seront impactés les acteurs publics de tout l’Espace Économique Européen auxquels font appels les entreprises françaises. Et par là, réduire les ressources pour des acteurs publics étrangers dont une bonne partie provenait des entreprises françaises (exemple de collaborations avec des écoles ou universités de certains pays de l’union).

2. Conclusion

Ce changement de la loi sur le CIR aura un impact de long terme sur la recherche et l’innovation dans les entreprises mais aussi et surtout chez les acteurs publics. D’autant que l’efficacité du CIR n’est plus à démontrer (sauf à vouloir convaincre une personne dogmatique). La suppression du plafond relève clairement d’une volonté de contrôle des coûts alors que la perte de doublement semble liée à une plainte pour aide d’état illicite. Hélas, sur ce dernier point, nous aurions pu prendre l’option 2 (voir chapitre 3.4)…mais cette dernière ne réduirait que peu le montant du CIR.

A ce jour, cela doit amener les entreprises :

  • A revoir leur processus d’achat de prestation en intégrant ce nouveau coût supérieur pour les prestations publiques (le restant pour l’entreprise augmente de 40% à 70%), les avantages et les inconvénients de ce type de collaboration (délais, administratif, propriété intellectuelle ; compétences et expertises ; moyens expérimentaux)… versus un acteur privé.
  • A anticiper la baisse de CIR dans leur budget de R&D 2022 !
  • A revoir encore leur contrat de prestation pour s’assurer de la « partie réalisée par l’acteur public ».

Les acteurs publics pourront :

  • Revoir leur politique de prix (puisque disparition de l’avantage avec le CIR).
  • Revoir leur processus de R&D pour renforcer leurs avantages compétitifs, pour mieux faire valoir leurs compétences et expertises

3. Annexe

3.1 Information presse

Cette bien mauvaise nouvelle a été rapidement commentée dans un article du Figaro, en date du 05 Janvier 2021, anonymisé pour cette publication.

« Le constat est partagé : le crédit d’impôt recherche (CIR), qui permet aux entreprises de déduire une partie de leurs dépenses de recherche et d’innovation, est globalement efficace. Grâce au CIR, qui coûte à l’État 6 milliards d’euros par an, « la France a acquis une position de hub mondial de la recherche industrielle en maintenant un cours compétitif », estime l’Association nationale recherche technologie (ANRT) dans la dixième édition de son rapport sur l’effet du crédit d’impôt sur la compétitivité publiée en décembre dernier.

Seulement voilà, les récents aménagements apportés à ce CIR, créé en 1983 avant d’être considérablement élargi en 2008, suscitent des inquiétudes. « Cela fait 10 ans que nous avons un système qui fonctionne très bien, qui est vertueux, ce qui n’est pas courant. Mais il y a un risque de voir la dynamique se briser », avertit le directeur d’études à l’ANRT. » Suite sur le site du Figaro.

Commentaires complémentaires de KMCe4U

Comme nous le démontrons par des exemples concrets, il est hélas d’évidence que la mesure aura un impact sur la recherche et l’innovation dans le secteur privé, le financement des acteurs publics (et donc la recherche et l’innovation dans le public) ou encore que cela va réduire, à plus ou moins long terme, la collaboration entre le privé et le public.

La réduction du CIR serait de 150M€ sur les 6m€ soit -2,5%… alors même que sont maintenues d’autres dépenses dans le CIR « non essentielles » à l’innovation.

Enfin, le rabotage ne simplifie aucunement les modes calculatoires ni les démarches ni les justifications toujours plus importantes à produire.

Le gouvernement, via un député ou le ministère se défend de vouloir réduire les collaborations via des leviers comme le PIA4 ou encore de suivre / anticiper des règles européennes.

Nous sommes là dans une réponse quelque peu insuffisante « faut relativiser » qui n’intègre pas de vision long terme des relations privé – public, du financement des écoles et universités, du transfert de technologie… Ce manque de vision était pointé par la Cour des Comptes.

Nous sommes encore dans « je déshabille Paul pour habiller Jacques » en retirant 150 M€ sur le CIR (dispositif phare de la France, stable, vertueux…) pour donner 10 000 M€ via un PIA4 pour lequel nous n’avons pas de retour d’expérience et dont les modalités ne sont pas encore connues.

Mais qu’en est-il ? Entre Règlement européen et PIA4 ?

3.2 Règles européennes sur les aides d’État

Règlement de la Commission Européenne du 18 Décembre 2013 relative aux aides d’États

On entend par entreprise, aux fins des règles de concurrence énoncées dans le traité, toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (6)

Amendement du règlement relatif aux aides d’Etats, en date du 02 Juillet 2020

La Commission a lancé l’évaluation de ces règles le 7 janvier 2019 sous la forme d’un «bilan de qualité». Dans le cadre du pacte vert pour l’Europe ( 5 ) et de la stratégie numérique pour l’Europe, la Commission a déjà annoncé son intention de réviser une série de lignes directrices d’ici à la fin de 2021. Sur cette base, elle décidera de prolonger encore ou de mettre à jour les règles.

Compte tenu de la large portée du bilan de qualité et du fait que les résultats des évaluations ne seront pas disponibles avant la fin de l’année 2020, une décision d’orientation sur l’élaboration des règles en matière d’aides d’État applicables après 2020 ne peut pas être prise à temps pour garantir la sécurité juridique et la stabilité pour les parties prenantes en ce qui concerne les règles applicables après 2020. Une prolongation est donc nécessaire pour permettre d’évaluer correctement les règles en matière d’aides d’État et garantir leur prévisibilité et leur stabilité pour les États membres.

Par conséquent, il convient de prolonger de trois ans, jusqu’au 31 décembre 2023, la période d’application des règlements (UE) no 1407/2013 et (UE) no 651/2014.

Commentaires KMCe4U

Nous considérons que la politique de contrôle des aides d’état est une excellente chose par principe (même si nous ne devons pas être naïfs versus d’autres nations peu scrupuleuses dans ce domaine).

Il est effectif qu’un amendement du règlement portant sur les aides d’état a été voté en Juillet 2020. Cela pourrait être la source des anticipations du gouvernement quant à l’exclusion de ce doublement. Cet amendement prolonge de 3 ans la politique initiée en 2013. On peut supposer que, fort de cet élément, le CIR pourrait bénéficier pour 3 ans de la dérogation obtenue auprès de la commission européenne. Donc pourquoi modifier le CIR sur ce point particulier des dépenses externalisées auprès d’acteurs publics ?

Il est probable que ce changement de loi soit lié à une plainte formelle qui a été déposée auprès de la commission pour dénoncer une distorsion de concurrence. De plus, la commission va rendre un rapport fin 2021 et pourra être amenée à modifier le règlement relatif aux aides d’état.

Enfin, à regarder de plus près, on note que « toute entité exerçant une activité commerciale » est considérée comme entreprise dans ce règlement. De fait, bon nombre d’acteurs publics français pourraient être reconnus comme des entreprises (cellules de valorisation par exemple).

Ainsi, si la contrainte européenne utilisée comme argument est avérée, nous nous devons de l’appliquer pour une cohérence européenne. Hélas, l’option 2 (voir annexe 3.4) aurait pu être choisie …et conserver ce doublement des dépenses pour les prestations de recherches fondamentales. Qui d’ailleurs, pour les entreprises qui externalisent auprès des acteurs publics, est une majorité des activités (thèse de doctorat, nouveaux matériaux…). La recherche appliquée et le développement expérimental étant, pour ces entreprises, réalisés en leurs locaux.

En conclusion, l’occasion fait le larron… L’option de retirer le doublement permet de réduire les dépenses et d’éviter des tensions pour « aides d’état illicites ».

3.3 Le PIA4

Communiqué du gouvernement : https://www.gouvernement.fr/4eme-programme-d-investissements-d-avenir-20-milliards-d-euros-pour-l-innovation-dont-plus-de-la.

Il combinera deux logiques d’intervention visant à accélérer l’innovation dans tous les secteurs, tout en simplifiant la lisibilité des outils d’intervention et de financement : des investissements stratégiques et prioritaires   ainsi que des financements pérennes pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation.

Des investissements stratégiques et prioritaires

Cette nouvelle logique d’investissement dite « dirigée » a pour ambition de financer des investissements exceptionnels qui répondent aux enjeux de transition de notre économie et de notre société. Il s’agit notamment de technologies d’avenir portant sur marchés stratégiques et des secteurs tels que les technologies vertes et numériques, la recherche médicale et les industries de la santé, les villes de demain, l’adaptation au changement climatique ou encore l’enseignement numérique.

Des financements pour soutenir les écosystèmes d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation

Ces financements dits « structurels » ont pour ambition de pérenniser et amplifier l’efficacité des écosystèmes d’enseignement supérieur et de recherche crées par les précédents PIA mais aussi d’accompagner les entreprises innovantes. Il s’agit par exemple de poursuivre et amplifier la transformation des sites académiques pour hisser les universités françaises et européennes vers le meilleur niveau international, ou encore d’amplifier l’effort de transfert technologique depuis les acteurs de la recherche académique jusqu’aux entreprises…

Qu’est-ce que l’on peut lire dans ce communiqué :

  • Des investissements « ciblés » donc cela signifie que certains secteurs ne bénéficieront pas de ce programme d’investissement. Sont concernés : les technologies vertes, le numérique, le médical, la santé, les villes, le climat ou l’enseignement numérique. Quid des secteurs de l’agroalimentaire, du transport (automobile, aérien, train…), de la chimie, de l’électronique… qui sont pourtant désignés comme des secteurs stratégiques du plan de relance actuel (https://www.bpifrance.fr/…/Appel-a-projets-Plan-de-relance-pour-l-industrie-Secteurs-strategiques). Ces secteurs pourront toujours monter des dossiers « environnement ou climat ou numérique »… ?
  • Des financements de l’enseignement supérieur de recherche et d’innovation ! financements structurels ?? il est heureux de lire « mais aussi les entreprises innovantes »… en clair, ce financement sera plutôt orienté vers les universités ou sites académiques, vers les cellules de transfert technologiques (qui auront du mal à transférer du savoir si l’entreprise ne travaille plus avec eux)…
Commentaires de KMCe4U

Il est toujours favorable pour l’innovation en France d’injecter des fonds publics. Néanmoins, comme démontré par de très nombreuses publications d’économistes ou par la Cour des Comptes, trop de pilotage par la sphère publique conduit à réduire l’innovation ou bien à ne pas accroître l’innovation dans les entreprises.

SAUSSIER, Stéphane et TIROLE, Jean. Renforcer l’efficacité de la commande publique. Notes du conseil d’analyse économique, 2015, no 3, p. 1-12 ;

Dans une note du Centre d’Analyse Stratégique ; LALLEMENT, Rémi. L’aide publique aux entreprises en matière de RD et d’innovation: quelle efficacité. Document de travail du Centre d’analyse Stratégique, 2011, p. 1983-2011. .Les éléments développés donnent tout son sens à la politique économique menée en France ces dernières années. Celle-ci consiste à y relever l’effort global de R & D non pas en chargeant les pouvoirs publics de réaliser eux-mêmes ce surcroît de dépenses de R & D mais en incitant les entreprises à le faire de leur côté. En témoignent plusieurs actions en faveur du développement de la R & D privée, dont la réforme du crédit d’impôt-recherche (CIR) en 2008, ainsi que les actions de l’Agence nationale de la recherche (ANR) favorisant la recherche partenariale, surtout via le financement du concours d’entreprises innovantes et la mise en place des instituts Carnot qui collaborent intensément avec le monde industriel.

Le PIA4 est un moyen de financements sectoriels et de modernisation du système d’enseignement supérieur de la France. Il ne remplace en aucun cas les pertes qui seront occasionnées par le non doublement des dépenses publiques dans le CIR. Et quitte à réduire de 150M€ une enveloppe, pourquoi ne pas avoir réduit celle du PIA4 ?? Cela aurait permis de maintenir / de stabiliser le levier le plus efficace de financement public de la recherche en France.

En revanche, sur le CIR, France Stratégies, dans une étude de 2010 estimait que les entreprises ont augmenté leurs dépenses de R&D au moins autant qu’elles n’ont reçu d’avantage fiscal, sinon plus. C’est ce qu’on appelle l’effet multiplicateur : pour chaque euro d’argent public versé par le biais du CIR, les entreprises auraient dépensé entre 0,9 et 1,5 euro supplémentaire en R&D. On parle bien de R&D supplémentaire !!

En conclusion, ce PIA4 est donc contre-productif sur l’autonomie des écoles et universités, tout comme l’est l’annulation du doublement des dépenses confiées par des entreprises à des acteurs publics.

3.4 Genèse de la loi

3.4.1 Les motifs plf_ecox2023814l_cm_28.09.2020.pdf (legifrance.gouv.fr)

Les motifs exposés par dans le projet de loi de finance pour 2021, enregistré à l’assemblée nationale le 28 septembre 2020, sont les suivants :

En premier lieu, le présent article prévoit d’harmoniser les modalités de prise en compte des dépenses relatives à des opérations de recherche confiées à des organismes tiers pour le calcul du crédit d’impôt recherche (CIR) en alignant les dispositions relatives aux opérations confiées aux organismes publics ou assimilés sur celles prévues pour les organismes privés. Il supprime le dispositif de doublement d’assiette qui avait été instauré en 2004 dans le but d’inciter à la synergie entre la recherche publique et la recherche privée.

Cette mesure, déjà préconisée par la Cour des comptes dans son rapport en 2013 sur « l’évolution et les conditions de maîtrise du crédit d’impôt en faveur de la recherche », vise à sécuriser le CIR au regard de la réglementation européenne en matière d’aide d’État. Elle permet par ailleurs de simplifier le dispositif et de mieux maîtriser son coût pour les finances publiques.

3.4.2 Évaluations préalables des articles EP_PLF_2021-W.pdf (budget.gouv.fr)

Nous pouvons encore trouver :

1.1. Problème à résoudre, raisons pour lesquelles les moyens existants sont insuffisants et le cas échéant nécessité de procéder à une nouvelle modification des dispositifs existants, concernant les opérations de recherche externalisées

Le dispositif de doublement d’assiette pour la sous-traitance publique a fait l’objet de critiques par la Cour des comptes dans son rapport portant sur l’évolution et les conditions de maîtrise du crédit d’impôt en faveur de la recherche de juillet 2013. Elle proposait sa suppression par souci de simplification et de maîtrise du crédit d’impôt.

Une plainte formelle concernant le dispositif du doublement d’assiette pour la sous-traitance publique a été déposée le 1er octobre 2019 auprès des services de la Commission européenne, au motif qu’il constituerait une aide d’État étant donné qu’il procure aux organismes de recherche publics et assimilés un avantage économique par rapport aux entreprises du secteur concurrentiel.

1.2. Objectifs poursuivis par la réforme concernant les opérations de recherche externalisées

Une modification est nécessaire afin d’obtenir le retrait de la plainte déposée auprès de la Commission européenne et de sécuriser les entreprises sur le CIR dont elles ont bénéficié.

Le présent article prévoit de supprimer le mécanisme de doublement d’assiette pour la sous-traitance publique. Il harmonise les modalités de prise en compte des dépenses relatives aux opérations confiées aux organismes tiers, qu’ils soient privés ou publics, et permet dans le même temps de simplifier le dispositif et de le rendre plus accessible aux entreprises.

Options possibles et nécessité de légiférer

Liste des options possibles concernant les opérations de recherche externalisées:

Option n° 1 : appliquer les mêmes modalités de prise en compte des dépenses relatives aux opérations de recherche confiées aux organismes de recherche tiers, publics ou privés, dans l’assiette de calcul du CIR de l’entreprise donneuse d’ordre.

Option n° 2 : réserver le dispositif de doublement d’assiette aux dépenses de recherche fondamentale confiées aux organismes de recherche tiers, publics ou privés.

Description des avantages/inconvénients des différentes options concernant les opérations de recherche externalisées

Option n° 1 : cette option permet d’éteindre de manière certaine le contentieux sur le mécanisme de doublement d’assiette en retirant tout fondement à la plainte déposée auprès des services de la Commission européenne. Elle permet de sécuriser le montant de CIR dont ont bénéficié les entreprises et contribue en outre à la simplification du dispositif en instaurant une modalité uniforme de prise en compte des dépenses de recherche externalisées.

Option n° 2 : cette option permet d’ôter son caractère sélectif au dispositif de doublement d’assiette et de le rendre conforme à la réglementation en matière d’aides d’État. Toutefois, la distinction entre recherche fondamentale et recherche appliquée n’est pas aisée à établir en pratique. Les divergences d’appréciation pourraient conduire à une insécurité des entreprises sur le montant de leur CIR et remettre en cause le financement des projets de recherche.

Raisons ayant présidé au choix de l’option concernant les opérations de recherche externalisées

L’ option n° 1 est privilégiée car elle permet à la fois de sécuriser le dispositif du CIR au regard de la réglementation européenne en matière d’aides d’État et de simplifier le dispositif de sous-traitance, en renforçant son accessibilité pour les entreprises.

Dispositif juridique – Articulation avec le droit européen en vigueur ou en cours d’élaboration (traités, droit dérivé, jurisprudence, aides d’État)

La partie de l’article portant sur la modification des modalités de prise en compte des dépenses relatives aux opérations de recherche externalisées pour le calcul du CIR est compatible avec le droit européen en vigueur ou en cours d’élaboration. Elle vise, en supprimant le dispositif de doublement d’assiette pour la sous-traitance publique, à éteindre le contentieux ouvert à la suite du dépôt d’une plainte auprès des services de la Commission européenne.

Le mécanisme de doublement d’assiette pour la sous-traitance publique procure un avantage indirect au bénéfice d’une liste limitative d’organismes de recherche, qui, pour un certain nombre d’entre eux, ne peuvent être qualifiés d’organismes de recherche exerçant des activités non économiques au sens du droit de l’Union européenne. Ce dispositif est susceptible d’être considéré comme constitutif d’une aide d’État.

4. Impact de la disposition envisagée

4.1.1. Incidences micro et/ou macro-économiques

La mesure supprime l’incitation pour les entreprises à confier leurs opérations de recherche à des organismes de recherche publics ou assimilés plutôt qu’à des organismes privés. Les organismes de recherche bénéficieront du même avantage concurrentiel, qu’ils soient publics ou privés. Elle permet par ailleurs de simplifier le dispositif et d’améliorer son accessibilité aux entreprises.

4.2. Évaluation des conséquences pour les administrations publiques concernées – Incidences budgétaires (coûts/économies nets de la mesure proposée) – Disposition fiscale

Augmentation nette (+) ou diminution nette (-) des recettes fiscales exprimée en millions d’euros.

 
4.3. Description synthétique de la méthode d’évaluation utilisée

Le gain pour l’État résultant, d’une part, de la suppression du doublement des dépenses de sous-traitance relatives aux opérations réalisées par les organismes de recherche publics ou assimilés à la condition qu’il n’y ait pas de lien de dépendance entre eux, et d’autre part, de l’harmonisation des plafonds de dépenses éligibles, a été calculé à partir des données déclaratives relatives aux créances de CIR millésime 2016 définitif et 2017 semi-définitif.

Le chiffrage a consisté à calculer, pour chaque entreprise ayant déclaré des dépenses éligibles au doublement de leur montant, l’impact de la suppression du doublement d’assiette sur le montant de la créance de CIR. Le montant de cette créance doit être distingué de celui du coût budgétaire de la dépense fiscale, qui dépend notamment des comportements d’imputation sur l’impôt dû par les entreprises bénéficiaires.

Les effets de comportement pouvant résulter de la mesure ne sont pas pris en compte.

Mise en œuvre de la disposition – Liste prévisionnelle des textes d’application nécessaires

Les modalités d’agrément des organismes éligibles aux opérations de recherche externalisées par les entreprises éligibles au CIR feront l’objet de mesures d’application par décret simple.

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